Alors que RTE engage 100 milliards d’euros d’investissements d’ici 2040, le marché européen de l’électricité entre dans une nouvelle ère. Décryptage des impacts techniques, géopolitiques et économiques pour les entreprises.

Le 4 septembre 2025, RTE a lancé un débat public national sur le futur de son réseau électrique, sous l'égide de la Commission nationale du débat public (CNDP). Ce Schéma Directeur de Développement du Réseau (SDDR), soumis à consultation jusqu'au 14 janvier 2026, prévoit près de 100 milliards d'euros d'investissements à horizon 2040. Une initiative majeure, alors que le marché européen de l'électricité fait face à des défis sans précédent : tensions géopolitiques, volatilité des prix et besoin urgent de renforcement des interconnexions.

Une concertation inédite pour repenser le réseau électrique

C'est la première fois que le gestionnaire du réseau de transport d'électricité, RTE, soumet un plan d'investissement d'une telle ampleur à une concertation publique ouverte.
Jusqu'en janvier 2026, cette consultation invite citoyens, collectivités et acteurs économiques à s'exprimer sur quatre priorités :

  • l'adaptation du réseau au changement climatique ;
  • le raccordement massif des nouvelles capacités renouvelables (éolien en mer, solaire, hydrogène) ;
  • le renforcement de la sécurité d'approvisionnement ;
  • et la maîtrise des coûts d'infrastructure pour les utilisateurs.

L'objectif : définir le réseau français et européen de demain, capable d'intégrer la décarbonation tout en garantissant la stabilité du système électrique.

Un plan d'investissement historique de 100 milliards d'euros

RTE prévoit un effort financier sans précédent : 100 Md€ d'ici 2040, soit un triplement du rythme annuel d'investissement (de 3 à 8 Md€/an).
Ce plan vise à :

  • moderniser 21 000 km de lignes pour les adapter aux aléas climatiques ;
  • raccorder 22 GW d'éolien offshore ;
  • renforcer les interconnexions européennes (France-Espagne, Italie, Royaume-Uni, Benelux) ;
  • digitaliser la gestion du réseau grâce à la data et à l'intelligence artificielle.

Le plan RTE 2025-2040 en résumé

🔹 Total : ~ 100 Mds € d'ici 2040
🔹 Objectif : doubler la capacité d'intégration du réseau tout en garantissant la sécurité d'approvisionnement.

Un financement mixte et déjà amorcé

Le financement de ce plan repose sur plusieurs leviers :

  • les recettes du tarif d'utilisation des réseaux (TURPE),
  • les emprunts obligataires régulés que RTE lève à bas coût sur les marchés,
  • et les contributions directes des demandeurs de raccordement (producteurs ENR, sites industriels, opérateurs de stockage).

La Commission de régulation de l'énergie (CRE) a d'ailleurs anticipé cette montée en charge dans le TURPE 7, en vigueur depuis février 2025 : + 9,6 % sur le transport et + 7,7 % sur la distribution. Cette hausse finance déjà les premiers chantiers du SDDR et les renforcements de réseau à venir.

Un plan aux répercussions européennes

Si le SDDR est un document national, son impact dépasse largement les frontières françaises.
Les interconnexions transfrontalières constituent le socle du marché intérieur de l'électricité. Des projets récents le confirment :

  • France – Espagne (Golfe de Gascogne) : mise en service prévue en 2028, financée par la BEI à hauteur de 1,6 milliard €, capacité portée à 5 GW.
  • Italie – Grèce : accord signé en mai 2025 pour une liaison sous-marine de 1 000 MW, représentant 2 milliards € d'investissement.
  • France – Royaume-Uni : plusieurs projets (Aquind, GridLink, FAB Link) sont réévalués par la CRE et Ofgem, dans la perspective d'une mise en service post-2030.

Ces infrastructures contribueront à fluidifier les échanges d'électricité et à amortir les chocs de prix en cas de tension sur un marché national.

Le poids des tensions géopolitiques sur le marché européen

L'année 2025 a rappelé la vulnérabilité du marché européen aux crises internationales.
En septembre, les prix du gaz et du CO₂ ont bondi de près de 20 % en une semaine, sur fond de tensions au Moyen-Orient et d'incertitudes autour du GNL russe.
Cette flambée s'est immédiatement répercutée sur les prix de gros de l'électricité.

Selon le Joint Research Centre de la Commission européenne, les chocs géopolitiques sont désormais la première source de volatilité du marché, devant les aléas climatiques.
Les dépendances logistiques — notamment au GNL américain et qatari ou aux routes maritimes en mer Rouge — continuent d'exposer l'Europe à des risques structurels.

Les interconnexions comme bouclier stratégique

Dans ce contexte, le maillage du réseau européen devient un levier de résilience économique :

  • une meilleure interconnexion entre États permet d'amortir les fluctuations de prix ;
  • à l'inverse, un réseau cloisonné crée des zones à tarifs élevés et fragilise la sécurité d'approvisionnement.

Le plan RTE 2025-2040 renforce donc la souveraineté énergétique de la France tout en consolidant la stabilité du marché européen.

Ce que cela change pour les entreprises

Les entreprises doivent intégrer ces évolutions dans leur stratégie énergétique :

  • Prudence sur les contrats long terme : les zones à faible interconnexion sont plus exposées aux tensions tarifaires.
  • Diversification des sources d'énergie et participation aux mécanismes européens deviennent des atouts de compétitivité.
  • Flexibilité énergétique : l'effacement, le stockage ou l'autoconsommation offrent des leviers majeurs d'optimisation.

Pour les grands comptes, la transformation du réseau apportera une visibilité renforcée sur les coûts d'accès, une meilleure intégration aux marchés européens et un accès élargi à la flexibilité.

Mais cette transformation exige une lecture experte des évolutions techniques et réglementaires. Les décideurs énergie doivent anticiper les chantiers, cartographier leurs sites exposés et ajuster leurs stratégies d'achat au rythme de la transition du réseau.

Le rôle clé de l'accompagnement expert

Face à cette mutation, un partenaire spécialisé comme Alliance des Énergies (ADE) ou PEP'S apporte une valeur ajoutée décisive :

  • décryptage des enjeux infrastructurels et géopolitiques ;
  • veille active sur les interconnexions et les calendriers d'investissement ;
  • modélisation de scénarios d'achat et de couverture ;
  • accompagnement stratégique et opérationnel sur vos contrats multi-pays.

L'objectif : transformer la complexité du marché européen en avantage concurrentiel durable.

Conclusion

En lançant ce débat public, RTE engage l'ensemble des acteurs dans une réflexion collective sur le futur du système électrique. Ce plan d'investissement n'est pas seulement une politique nationale : il constitue un pivot stratégique pour la sécurité énergétique européenne.
Dans un contexte de tensions internationales et de transition accélérée, anticiper ces transformations devient une priorité pour les entreprises. Contactez nos experts ADE/PEP'S pour analyser les impacts du SDDR sur vos sites et bâtir une stratégie énergétique résiliente et européenne.